Le basket comme outil thérapeutique
Un projet qui a rapidement séduit les deux parties : l'IME salue le caractère durable de l'opération, et le club est conscient du rôle qu'il doit jouer sur le plan local. A commencer par Fabrice Courcier, entraîneur de l'équipe professionnelle. Dès septembre, il a tenu à passer plusieurs semaines au sein de la structure : afin de mieux connaître les enfants, comprendre les problèmes de chacun et échanger avec les éducateurs.
Depuis novembre, un groupe de 17 jeunes déficients mentaux, âgés de 12 à 18 ans, vient s'entraîner deux fois par mois à la salle Maurice Hugot. Comme les pros. Chaque séance est animée par les joueuses et préparée avec les éducateurs de l'Institut. Les exercices et jeux sont adaptés aux capacités motrices des adolescents. Le basket devient ici une véritable activité thérapeutique : un travail sur le corps et le développement cognitif des enfants, mais aussi sur l'estime de soi.
Au fil des séances, les progrès sont réels. Aucun regard de pitié entre joueuses et enfants, mais plutôt une véritable complicité qui grandit.
Interview Marie Fouteret :
Deux fois par mois, Marie Fouteret anime avec ses coéquipières des séances basket pour des jeunes déficients mentaux. Un programme qui apporte autant aux enfants qu'aux joueuses, nous livre-t-elle.
Comment ont évolué les enfants au fil des séances ?
L'évolution s'est surtout ressentie au niveau mental. Ils sont beaucoup plus ouverts lors des entraînements de basket. Ils sont à l'écoute, très attentifs. Ils appliquent les consignes. A l'IME, ils sont beaucoup plus renfermés et ont du mal à rester concentrer. Ces enfants sont fiers d'être entraînés par des sportives de haut niveau. Certains viennent régulièrement nous voir aux matches avec leurs parents. D'autres lisent la presse et découpent les articles sur le club : ils sont contents de nous connaître. Du coup, ils ont davantage confiance en eux. C'est bien.
Je connais certains des enfants car j'ai été éducatrice dans cet IME. Notamment un petit garçon très renfermé qui m'a beaucoup touchée. Il parle très peu et reste toujours " dans son monde ", en général. Pendant les séances, il s'est véritablement transformé : il s'ouvre, va vers les joueuses et encourage ses coéquipiers. Parfois même, lorsqu'on crie fort pour encourager les jeunes, c'est lui qui vient nous voir pour nous dire : " arrête de crier comme ça ! ". C'est impressionnant. Ce petit garçon m'a vraiment touchée. Leurs éducateurs sont également très surpris des progrès des enfants.
Comment s'investissent tes coéquipières ?
Toutes les joueuses sont très impliquées, même les étrangères. Elles ne perçoivent pas ce type d'actions comme une contrainte. Au contraire. Elles font l'effort de parler en français, elles proposent des exercices et s'appliquent pour les expliquer aux enfants. Je suis assez admirative, car c'est difficile de donner des consignes aux enfants déficients mentaux. Il faut leur donner une information à la fois pour qu'ils comprennent le jeu. Et elles le font très bien. C'est super.
En tant que joueuses, vous apprenez aussi beaucoup de ces échanges ?
Indiscutablement, oui. Sur le plan sportif d'abord. Cette année, il y a une très bonne cohésion dans l'équipe. Toutes les joueuses s'entendent bien. Et je suis convaincue que ce projet y est pour quelque chose. On se concerte beaucoup. On apprend autrement et autre chose.
On est obligé de s'entendre pour préparer et animer les séances. Sinon, ça ne marche pas. Nous nous devons de montrer l'exemple aux enfants. Dans les sports collectifs comme dans la vie, ça ne peut pas fonctionner si on se dispute.
Nous apprenons aussi à mieux nous exprimer, écouter et relativiser nos petits bobos quotidiens. Et ça nous fait du bien de sortir de notre routine " entrainement-match-récupération ". Ca ne peut faire que du bien de " changer d'air ".
Pour toi, c'est important que les basketteuses professionnelles s'investissent ainsi ?
C'est beaucoup plus que ça. Pour moi, ce type d'action est quelque chose de " normal ". Un sportif de haut niveau doit s'impliquer localement. Tous les clubs dans tous les sports devraient en faire autant. Avec l'USAPH par exemple, nous animons deux séances par mois. Ca nous prend trois heures de temps par mois. C'est rien, au regard de la joie et des progrès réalisés par les enfants. Il faut le voir pour le croire. Quand on assiste à cela, on a du mal à envisager de ne plus rien faire pour des populations en difficulté. Ca fait partie de la saison.
Entretien réalisé par Aurélia Pilet (FFBB-LFB).