P.Vincent : « Transformer les choses »
Après la Coupe de France 2005, vous avez battu Valenciennes au Prado en novembre dernier. Est-ce la fin du syndrome ?
Je ne fonctionne pas selon ce type de référence qui relève plus de la croyance que de la raison. Je m’en tiens aux données du terrain. Nous affrontions une grosse équipe de Valenciennes tandis que nous étions en reconstruction. L’opposition était difficile certes mais le syndrome était plus dans les têtes des joueuses, plus enclines au croyance. Je leur disais d’être patientes, que leur tour viendrait. Nous étions plus dans une quête de victoire. La victoire en finale de Coupe de France nous a conforté dans les valeurs insufflées au groupe. Malgré tout, nous avons perdu dans la foulée la première manche de la finale 2005. En tous les cas, point de signe indien ! Nous savions désormais être capables de les battre. Le match aller contre VO ? La sensation de dominer un match est furtif et pas transposable à l’envie. Cette année, nous avons battu VO avec une impression d’un adversaire diminué, maladroit. Les circonstances de ce match étaient singulières. Le retour sera un tout autre match.
STABILITE RETROUVEE ET CHALLENGE A RELEVER
Votre équipe, vos joueuses sont elles mûres pour l’exploit ?
A la base du projet de reconstruction, nous avons relooké l’effectif en espérant challenger Valenciennes. Cela faisait partie d’une stratégie communication globale. Nous avons fait des choix et bâti une équipe que nous avons ajustée au cours des trois exercices, avec des moyens différents. C’est peut-être la fin d’un cycle de la reconstruction autour de jeunes joueuses et d’une stabilité retrouvée. A l’intersaison, constatant nos carences offensives et de combat à l’intérieur, nous avons misé sur Bernie Ngoyisa, une joueuse peu cotée mais valeureuse, et aussi Sena Pavetic une jeune croate. Nous n’avons que 9 professionnels, nous ne pouvons pas consacrer un budget démesuré pour une vedette type Griffith ou Dydek. C’est pourquoi nous avons tenté ces paris. La situation nous donne raison finalement, l’argent ne suffit pas à faire le bonheur. Regardez Ekaterinbourg…
Vous arrivez au terme de votre contrat. Pensez vous partir ?
C’est prématuré d’évoquer cela aujourd’hui. J’ai toujours entraîné des masculins, en jeunes et dans les équipes nationales avant de prendre la direction du club de haut niveau féminin de Bourges. Je m’y sens bien et je peux aussi bien rester dans le club. Mais il est vrai que j’aimerais bien de nouveau entraîner des masculins.
Construire c’est bien mais vous ne voulez pas enfin jouir pleinement des fruits de cette construction ?
A chaque endroit où je suis allé, j’ai pris en main des situations difficiles. Partout il me fallait redresser une situation mal engagée. Bourges n’était donc pas une exception. Ce qui me plaît, c’est de transformer les choses. J’aimerais disposer d’une équipe championne d’Europe mais j’ai fondamentalement l’âme d’un éducateur. J’ai le sentiment de faire le même métier que des coaches plus exposés. De toute façon on ne prête qu’aux riches. Je suis un peu frustré du retour. Nous avons réalisé une bonne saison 2004-05, peut-être que le public est habitué depuis longtemps à la victoire. Vous savez, au début les gens ont eu très peur du rajeunissement de l’équipe. Quant je vois le résultat aujourd’hui…
« ATTENTION AU RELÂCHEMENT »
Que vous inspire Buffard en tant que coach de l’équipe nationale belge ?
C’est une reconnaissance de l’ensemble du basket féminin français. Au niveau européen, les trois formations françaises sont qualifiées pour les playoffs, le championnat de France est reconnu et s’est même resserré cette année. Notre basket est un des plus intéressants d’Europe. Les résultats perdurent. Cet événement se situe dans cette lignée.
Pour la reprise 2006 de la Ligue féminine, comment abordez vous le match contre Strasbourg ?
A l’aller nous avons joué une équipe amoindrie, sans son ailière scoreuse Awa Gueye [NDLR : victoire 104-49 en Alsace]. Depuis le club alsacien a visiblement recruté une joueuse intérieure. On pourrait croire qu’il est plus facile de préparer le match contre Strasbourg que contre Valenciennes, il n’en est rien. L’attention des joueuses est moins importante, le relâchement guette. Il nous faudra donc redoubler de vigilance et l’aborder sérieusement. Méfiance…
Propos recueillis au Palais des sports du Prado (Bourges) par Yann Kappes.
Photo : LFB/Stadium