Pour la première fois, l'Equipe de France s'est attachée les services d'un préparateur physique. Est-ce que vous y voyez là, une certaine reconnaissance de votre travail, l'aspect physique du basket est-il enfin reconnu ?
Vous savez, dans le cadre de la formation de préparateur physique estampillé FFBB, dans laquelle j'interviens, je vois de plus en plus de stagiaires impliqué par le Basket Ball féminin. Je pense que nous assistons à une avancée novatrice et la dimension athlétique du basket va nous amener à penser ça. C'est le cas de Jacky Commeres qui l'a compris, le cas de Pierre Vincent et d'autres entraîneurs dans la LFB qui se sont adjoints des assistants de préparation physique. On est dans une ère nouvelle, qui ne voit plus la préparation physique comme concurrente dans le temps de pratique mais véritablement comme accompagnement. Donc la préparation physique tutrice du physique au service du basket. Dans mon cas, c'est l'entraîneur, Jacky Commères qui est venu me chercher. Il n'avait aucune obligation de la part de la DTN, c'est lui seul qui a pris cette décision de m'introniser dans le staff donc c'est une véritable reconnaissance.
Comment appréhender-vous cette première expérience avec le basket, qui plus est féminin ?
Le basket est un sport très complet. Il concerne chaque partie du corps. Evidemment qu'en fonction du poste, nous allons plus ou moins insister sur certaines parties, mais pour moi qui viens de l'athlétisme, ça y ressemble fortement. Il y a une plateforme commune, la femme basketteuse court, saute, lutte, freine et tout ça pour marquer des paniers. La joueuse virevolte avec la combinaison de toutes ces tâches. Si les filles gagnent physiquement, elles seront performantes dans la durée.
"REATHLETISER LES JOUEUSES"
En cette période de reprise pour les clubs de Ligue Féminine, de quelle façon le travail peut-il être axé ?
Il faut ré-athlétiser les joueuses, les réadapter au basket, en amont des championnats et en amont des contenus basket. Alors si les joueuses reprennent à 5 semaines du début du championnat, elles pourraient bénéficier de 15 bons jours de préparation physique sans basket. Reprendre avant tout la capacité à courir, l'endurance. Redonner les moyens bioénergétiques à la joueuse de traverser le terrain. Une reprise des exercices de renforcement musculaire sur tous les groupes musculaires intéressés par la pratique, et je n'en vois aucun qui ne soit pas sur le corps humain intéressé par le basket ! Car le Basket Ball est une pratique très complète. Une grande partie aussi pour retrouver la vivacité des appuis, parce que le basket est multi directionnel avec variation d'impulsion donc il faut retrouver cette qualité des pieds voire même l'améliorer pour gérer les déséquilibres et prévenir d'éventuelles entorses.
Le travail sera-t-il identique avec des clubs jouant le milieu de tableau, ceux allant jusqu'en playoffs, et enfin ceux qui jouent les coupes d'Europe ?
On est dans une logique de reprise commune à tous les clubs. Lorsque je parle de deux bonnes semaines de travail, on est dans une reprise à cinq semaines mais plus tôt la reprise sera faite, plus stable seront les moyens athlétiques à disposition de ce sport. Parce qu'il y a un autre approche, celle d'une reprise tardive qui voit l'entraîneur mettre le basket en même temps que l'on reprend la forme physique et c'est là qui arrive les problèmes, ça se télescope. L'entraîneur n'est pas satisfait de la tenue des séances car les joueuses manquent d'endurance et qu'au plan musculaire, il n'y aura pas eu de renforcement et donc risques de blessures, courbatures...
Peu importe le club, il ne faut pas tirer un trait sur la préparation au cours de la saison, au contraire. Le challenge de la préparation est d'accompagner la joueuse pendant toute la saison. Il faut abandonner l'idée que la préparation ne fait que prendre du temps car ça apporte de la disponibilité et ça stabilise le potentiel. Donc au cours de la saison, la préparation est une préparation d'accompagnement à partir du moment où avant la saison, on aura bien travaillé. Pendant l'année, les sorties de séances sont l'occasion de faire des rappels d'aérobie, de faire des rappels de gainage, des rappels de renforcement musculaire et en début de séance, sur les échauffements, travailler sur la vivacité, la corde à sauter…
Ce sont des petites choses comme ça qui, par petites touches, mais où l'on court sans rupture tout au long de la saison, accompagnent vraiment l'athlète. C'est ce que les autres sports qui ont épousé la préparation physique (il cite alors le rugby), ont compris.
"LA PREPARATION PHYSIQUE EST ENCORE PLUS BENEFIQUE DANS LE BASKET FEMININ"
Après avoir passé du temps avec l'Equipe de France féminine, souhaitez-vous-y revenir ? Quel est votre futur dans la maison basket ?
Je ne peux pas me prononcer à la place de la Direction Technique mais mon sentiment c'est que depuis décembre 2006, date à laquelle ils m'ont proposé cette aventure, j'ai absolument épousé le Basket Ball dans ma tête. Et j'irai même plus loin, le Basket Ball féminin parce que, pour reprendre les paroles de Jacky, c'est vraiment chez les féminines, que la préparation à le plus de chance d'apporter des gains. C'est un challenge des plus intéressants que d'aider ces jeunes femmes à améliorer leur niveau de basket en multipliant à leurs talents des apports physiques. Et quand je vois leurs comportements en Equipe de France, je ne me trompe pas. Elles sont très assidues, très à l'écoute, c'est un bonheur de travailler avec elles. Et on le sait, la gente féminine est noblement scolaire, à savoir que lorsqu'on est précis dans nos consignes, ça donne du sens à ce que l'on propose et elles y vont, elles foncent, elles s'appliquent et elles réalisent. Alors oui j'espère avoir un futur dans le Basket Ball et qui plus est féminin.
UN REGARD D'ACCOMPAGNEMENT, UN CONSULTANT REFERENT
Les campagnes des Equipes de France sont essentiellement programmées l'été. Pendant l'année, qu'allez-vous faire de ces filles si appliquées ?
Jacky m'a donné mission de suivre les joueuses du groupe France tout au long de la saison. C'est-à-dire que je serai un interlocuteur privilégié des assistants des clubs qui sont pourvoyeurs de nos joueuses. J'échangerai avec les joueuses par mail, je rendrais visite aux joueuses à l'occasion de matches et à tout moment selon besoin je serai leur référant. J'aurai un regard d'accompagnement, de prise de nouvelles et au besoin être consultant référant ressource, sur des contenus de préparation physique individualisée dès lors que les filles font partie du groupe France. Donc voir les joueuses tout au long de la saison, tout au long du calendrier de la Ligue féminine sera un de mes jobs et je m'y appliquerais avec grand bonheur.
Propos recueillis par Audrey Dubrunfaut (FFBB).
LA FICHE
Frédéric AUBERT
Date de naissance : 30 juillet 1955
Lieu de naissance : Paris (75)
Parcours :
1981–1992 Responsable de la section sport études athlétisme du Lycée de Montgeron
1984–1992 Cadre national Fédération Française d’Athlétisme (FFA) courses de haies
1992–1999 Enseignant formateur à l’UFR-STAPS de Paris V
1997–2004 Préparateur Physique de l’équipe de rugby professionnel du Stade Français – C.A.S.G Paris
2003 Co-préparateur Physique du XV de France pour la Coupe du Monde de rugby
2004–2005 Préparateur Physique en tennis au centre d’entraînement du Paris Jean Bouin - Lagardère
2004–2007 Préparateur Physique de l’Équipe de France de badminton
Depuis 2007 Enseignant formateur à l’INSEP (Paris) en méthodologie de l’entraînement et préparation au professorat de sport – professeur agrégé d’EPS, et Préparateur physique de l’Équipe de France féminine de basket.